Filière cacao – Le règlement européen sur la déforestation expliqué
Soutenue par la Délégation de l’Union Européenne en République du Cameroun et pour la Guinée Equatoriale, une session d’information consacrée au règlement sur le Déforestation a été organisée le vendredi 31 mai dernier à Yaoundé.
Initialement ouverte uniquement aux journalistes, la rencontre d’information consacrée au Règlement sur la déforestation de l’Union Européenne s’est étendue aux producteurs de cacao, nombreux dans la salle des conférences de l’Hôtel de ville de Yaoundé dont l’esplanade accueille l’édition 2024 du Festival Cacao-Café. Les organisateurs de cette rencontre facilitée par la Délégation de l’Union Européenne en République du Cameroun et pour la Guinée Equatoriale, n’en ont pas eu le choix. La question à l’ordre du jour est complexe voire sensible. Car, avec l’entrée en vigueur fin 2024 du Règlement sur la Déforestation de l’Union européenne (Rdue), le cacao provenant des terres déforestées après le 31 décembre 2020 ne pourra plus entrer dans le marché de l’Union européenne. Cette session ouverte au médias avait pour objectif de présenter les fondements de ce règlement, ses enjeux techniques, économiques et politiques, ainsi que leur niveau d’adaptation de la filière cacao du Cameroun à ces nouvelles dispositions. Toutefois, pour les producteurs et autres entités intéressées par cette filière, aucune occasion n’est superflue pour écouter et apprendre davantage sur le sujet.
En effet, 90% de la déforestation mondiale est due à l’expansion des terres agricoles. Ce qui contribue au changement climatique, à la perte de la biodiversité, à l’érosion des sols et à la désertification, et entrave le développement durable. Tandis que l’Union Européen (UE) en est un important consommateur, le cacao se trouve indexé comme l’un des moteurs de la déforestation. En 2020, le Cameroun a exporté 65% de sa production de cacao vers l’UE qui aujourd’hui prend des mesures pour minimiser le risque que des produits associés à la déforestation entrent sur le marché européen et pour augmenter la demande en produits dits « zéro-déforestation ». C’est ainsi qu’est né le Règlement sur la déforestation (RDUE). Celui-ci impose aux entreprises de s’assurer que les produits qu’elles mettent sur le marché de l’UE ou qu’elles exportent depuis ce marché ne sont pas associés à la déforestation.
Exigences
A quelques mois de l’entrée en vigueur de la RDUE, notamment en décembre 2024, c’est la panique parmi les producteurs du continent africain et ceux du Cameroun en particulier. Ils craignent que cette mesure ne soit discriminatoire et ne crée une barrière à l’entrée du marché de l’UE pour certains produits ou marchés exportateurs. À la faveur de la tenue du Cacao-café festival qui s’est déroulé sur le sol camerounais du 29 au 31 mai à Yaoundé, des membres de la Délégation de l’Union Européenne en République du Cameroun et pour la Guinée Equatoriale aux côtés du ministère du Commerce, des acteurs de la société civile dont le Saild représenté par Gislain Fomou, des représentants du Conseil Interprofessionnel du Cacao et du Café (CICC) et de l’Office National du Cacao et du Café (ONCC) se sont attelés à expliquer les enjeux au grand public à travers les journalistes.
Il est cependant utile de relever que cette mesure de l’UE ne concerne pas seulement le cacao dont sont friands les citoyens européens par la consommation des produits chocolatés. Mais aussi le bœuf en Amazonie, le palmier à huile en Indonésie ; le café, l’hévéa, le soja, le bois et leurs produits dérivés, chacun en ce qui le concerne issus de la déforestation, des parcelles volées (accaparement) ou qui implique le travail des enfants. En clair, à travers le Rdue, les Européens veulent désormais consommer des produits dont ils se sentent fiers de l’origine respectueux de l’environnement entre autres exigences.
Nadège Christelle BOWA
Réactions
Valoriser le modèle agroforestier en vigueur au Cameroun
Nous sommes en contact fréquent avec les organisations locales comme le CICC, le Fodecc, l’Oncc ; le ministère du Commerce, le ministère de l’Agriculture pour regarder ensemble les activités concrètes que nous pouvons réaliser dans le futur. D’ores et déjà, nous avons des activités qui ont été définies dans le cadre d’un processus qu’on a appelé les cocoa talks qui étaient de vastes consultations qui ont eu lieu pendant presque deux ans et qui ont abouti à une série d’actions. Deux d’entre elles sont en cours. Par exemple, des actions sur la traçabilité du système. Une autre action très intéressante est comment valoriser le modèle agroforestier en vigueur au Cameroun puisque nous savons que le cacao est surtout cultivé sous la forêt au Cameroun contrairement à ce qui se fait dans d’autres pays. J’en ai visité beaucoup et c’est très intéressant. On est en train de valoriser ce modèle au niveau international. C’est une action positive qui est faite entre le Cameroun et l’Union européenne.
Au moins 70% de notre production pourra être conforme
D’après les statistiques que nous avons au moins 70% de notre production pourra être conformes. On a des éléments suffisamment denses qui nous permettent de l’affirmer. Pour les 30% qui restent, nous sommes en train de prendre des dispositions pour mettre en place ce que nous appelons la traçabilité personnalisable. Pendant les ventes des produits, nous allons essayer de séparer le cacao conforme et non conforme et prendre les dispositions sur place pour identifier ces producteurs et géolocaliser leur parcelle avant de mettre leur cacao dans le circuit. Nous nous y attelons. Mais si par malheur en décembre, on n’arrive pas à exporter 100% vers l’Europe, nous aurons d’autres marchés vers lesquels nous pourrons expédier ce cacao. Mais le règlement en soi est une bonne chose. Le réchauffement climatique est réel. Nous en souffrons tous. Si l’Union Européenne met en place un règlement qui permet de sauver la planète, c’est pour nous tous.
Rassemblées par NCB