C’est possible d’allaiter son enfant jusqu’à l’âge de 2 ans
Allaiter son enfant pendant les 1000 premiers jours de sa vie est possible dans un contexte dit moderne. C’est le défi que s’est donné Odile Michelle Mengue, une maman qui travaille, depuis le jour où elle a entendu parler des bénéfices de cette pratique pour son bébé, sa santé et celui de son foyer. A moins de deux mois de la fin de son challenge, elle partage son expérience à la faveur de la célébration de la Semaine mondiale de l’allaitement maternel (Smam), célébrée du 1er au 7 août 2024 sous le thème : « Une chaîne de soutien à l’allaitement, la continuité des soins durant les 1000 premiers jours ».
CHALLENGE
Odile Michelle Mengue Messi est maman de quatre enfants. Elle vit à Yaoundé et travaille. La benjamine de cette fratrie est aujourd’hui âgée de 22 mois. C’est dire que dans deux mois, elle aura 2 ans. Sa particularité ! Contrairement aux enfants du même âge, Queen Andréa tête encore. Une prouesse pour sa maman qui a pris l’engagement de mettre en œuvre sur cette dernière, les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (Unicef) en faveur de l’allaitement maternel. Dans un premier temps, « j’ai allaité Queen Andréa de zéro à six mois sans aucun additif, uniquement avec du lait maternel », confie Odile Michelle. Ensuite, « à pratiquement six mois, on a introduit la diversification alimentaire ». Malgré les actes décourageants de son entourage, cette Ingénieur de profession tient le bon bout de son challenge. « Au début, il y avait beaucoup d’appréhensions autour de moi avec des gens qui disaient : après six mois, le lait maternel ne sert plus à rien à l’enfant. Il ne coule plus… Mais on s’est fait un défi. Car on s’est dit si la science dit que c’est possible et que les autres soutiennent que cela ne fait pas, on va essayer pour voir ». Le challenge vient essayer par la voie de l’expérience vécue de démêler le vrai du faux.
La satisfaction à quelques semaines de la fin de ce challenge est totale. Sur le plan physique et mental, la benjamine fait la différence d’avec ses aînés. « On a l’habitude de dire à la maison qu’Andréa est une grande mère. Elle est tellement éveillée. Elle anticipe tellement de choses qu’on a l’impression d’avoir à faire à une grande personne », témoigne sa génitrice selon qui, « Ses aînés ont certes été allaités au sein, mais on n’est pas allé au-delà de 15 mois. Donc, c’est véritablement un challenge pour moi ». La réalité n’est pas facile avoue Odile Michelle qui encourage cependant les mamans à tenter l’expérience qu’elle décrit comme gratifiante. « Au départ c’était dur parce qu’on a des responsabilités professionnelles, associatives, etc. Il fallait trouver le bon timing pour manager que ce soit Andréa, ses aînés ou les autres activités sans lésé personne. Et avec les recherches, on s’est rendue compte qu’il est possible de conserver du lait entre 4 à 7 heures à température ambiante, jusqu’à sept jours au réfrigérateur, six (06) au congélateur. Cela nous a permis à chaque fois qu’on avait un espace de tirer le lait et de le conserver pour que Queen Andréa ne manque jamais de son lait maternel », souligne la maman astucieuse.
L’apport salutaire du papa
Riche de cette expérience, Odile Michelle peut aujourd’hui affirmer en toute confiance : « Oui c’est possible d’allaiter son enfant jusqu’à deux ans. Au départ, c’est difficile parce qu’il faut se mettre en condition, il faut bien se nourrir, manger équilibré, manger diversifié et toujours être en état satiété, ne jamais se retrouver dans des situations où on a faim. Parce que la femme qui allaite ne doit pas attendre d’avoir faim, sinon elle n’aura pas une bonne montée laiteuse. En dehors des repas, on peut grignoter des dattes, des noisettes ou tout autre aliment qui permet d’avoir du bon lait au bon moment », recommande-t-elle en saluant l’apport de son époux dans cette aventure. En effet, reconnaît Odile Michelle, sans le soutien de « Monsieur Messi », cette entreprise n’aurait pas prospérée encourageant ainsi les papas à s’investir dans l’allaitement maternel pour le bien-être des enfants, du couple et du foyer.
En effet, selon le World Alliance for Breastfeeding Action (Waba), lorsque les pères soutiennent l’allaitement du bébé, l’allaitement s’améliore, la relation parentale et les enfants se développent plus rapidement. Avec les universitaires, les sages-femmes et les membres de la communauté…, les pères sont partie intégrante de la « chaîne chaleureuse de soutien à l’allaitement maternel » de la Waba. Connue sous l’appellation en Anglais « Warm Chain », celui-ci place le duo mère-enfant au centre et respecte la chronologie des 1000 premiers jours. Soit de la naissance jusqu’au deuxième anniversaire de l’enfant. Cette chaine s’efforce de mettre en lien les différents acteurs en coordonnant les efforts à tous les niveaux afin de fournir une continuité des soins. Car l’allaitement maternel est une affaire de tous. Les bénéfices sont nombreux. Selon les experts, non seulement, c’est un moyen peu coûteux de procurer la meilleure alimentation, cela protège le bébé contre les maladies courantes à court et à long terme. Cela réduit les cancers et d’autres maladies chez la mère.
Si pour les nations, ne pas allaiter représente un coût énorme, sa pratique favorise un gain ou des économies pour les familles. En bref, l’allaitement maternel est une décision intelligente comme le stipule certains messages des objectifs de développement durable (ODD). Chaque année, dans le monde, l’absence de l’allaitement maternel cause le décès de près de 600 000 enfants ; celui de près de 100 000 mamans. En plus des pertes économiques estimées à jusqu’à 341 milliards de dollars US. Au Cameroun, 92% des mamans allaitent leurs enfants. L’allaitement maternel est donc une réalité. Seulement déplore Elhadhi Issakha Diop, Chef Nutrition Unicef Cameroun : « L’allaitement maternel n’est pas optimal » car explique-t-il, « l’allaitement n’est pas exclusif jusqu’à six mois ». Même le fait de donner de l’eau au bébé doit être éliminé, « le lait maternel en contient en quantité suffisante pour satisfaire la soif du bébé», assure Pr Félicité Dongmo Nguefack de la Société camerounaise de pédiatrie (Socaped). Selon elle, même pour passer le hoquet, le lait maternel suffit. Il faut seulement avec une tasse propre.
Nadège Christelle BOWA