Biodiversité

COP 16 : La Banque Africaine de Développement dévoile des plans ambitieux pour l’Afrique

C’était au cours d’un évènement qui visait à partager des informations sur le travail de la Banque en matière d'investissement dans la biodiversité en Afrique, développer des partenariats, générer des connaissances, renforcer les capacités et fournir une assistance technique aux pays et institutions africains. Cela en soutien à la mise en œuvre du Cadre mondial Kumming-Montréal sur la biodiversité dans un contexte où la quasi-totalité des pays africains n’ont pas encore soumis leurs Stratégies et plans d'action nationaux pour la biodiversité (SPANB) en Anglais (National Biodiversity Strategies and Action Plans (NBSAPs). Face aux défis financiers, elle appelle à une mobilisation de partenaires dont le secteur privé.

Dans la plupart des pays africains, le capital naturel représente entre 30 et 50 % de la richesse nationale. Malgré ce potentiel et les grandes opportunités qu’il offre pour le développement de l’Afrique, le continent connaît une perte de biodiversité sans précédent en raison de plusieurs facteurs : la croissance démographique, les pratiques agricoles extensives, l’urbanisation rapide et le développement des infrastructures, etc. Selon le rapport sur l’empreinte écologique de l’Afrique produit par la Banque Africaine de développement et le WWF, l’Afrique a déjà connu un déclin de 40 % de sa biodiversité en 40 ans. Cette empreinte écologique totale devrait doubler d’ici 2040. Le continent étant confronté à d’énormes défis environnementaux, dont le changement climatique, la pollution, mais aussi la perte de biodiversité. Ce qui pourrait compromettre les perspectives de réalisation des objectifs de développement durable (ODD).

L’Afrique dispose cependant d’un énorme potentiel en matière de ressources naturelles, notamment 25 % de la biodiversité mondiale et 10 % des sources d’eau douce renouvelables de la planète. Il abrite également la deuxième plus grande forêt tropicale, la forêt du bassin du Congo, qui -selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE)- stocke environ 29 milliards de tonnes de carbone, ce qui représente trois ans des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Le bassin s’étend sur six pays : le Cameroun, la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, la République du Congo, la Guinée équatoriale et le Gabon. L’Afrique abrite également environ 65 % des terres non cultivées de la planète, 44,8 % du potentiel technique mondial en matière d’énergies renouvelables et 30 % des ressources minérales nécessaires à la transition écologique.

Soutenir la mise en œuvre du cadre mondial

Des atouts inestimables car, ces ressources naturelles constituent la base des activités économiques, du développement du secteur privé et de la création d’emplois, et sont un pilier majeur sur lequel reposent les systèmes de subsistance. C’est dans ce contexte que se déploie la Banque africaine de développement (BAD). Selon ses représentants à la COP 16 sur la biodiversité à Cali en Colombie, au rang desquels Dr Al-Hamndou Dorsouma, Manager, l’institution financière qui a récemment lancée sa Stratégie décennale 2024-2033, s’est engagée pour le financement de la biodiversité naturelle, afin d’augmenter les flux financiers pour la mise en œuvre du cadre mondial pour la biodiversité sur le continent. D’après Innocent Onah, Natural Ressources Officer, la Banque dispose d’un portefeuille croissant d’interventions sur le capital naturel et la biodiversité initialement canalisées dans le cadre de son approche intégrée visant à soutenir une reprise verte et durable à la suite de la crise COVID-19.

Ces projets intègrent des solutions fondées sur la nature et garantissent des investissements dans les bassins fluviaux et forestiers du Tchad, du Niger et du Congo, dans les réserves de biosphère et les zones côtières et, par la suite, dans la mise en œuvre du Cadre mondial pour la biodiversité Kunming-Montréal (CMMB) en Afrique. Il cite en exemple, le projet de la Grande Muraille verte estimé à 6,5 milliards USD ; L’initiative « Desert-to-Power » qui vise à exploiter le potentiel solaire à travers le développement d’une capacité de production solaire de 10 GW pour fournir de l’électricité à 250 millions de personnes dans 11 pays du Sahel; le « Projet de résilience climatique pour la préservation de la biodiversité (PRC/PB) » ; le projet phare Biosphère et Patrimoine du Lac Tchad (BIOPALT) dédié à la mise en place d’un système d’alerte précoce pour les sécheresses et les inondations, au développement d’activités génératrices de revenus et à la création de réserves de biosphère (6,5 millions de dollars).

Economie circulaire au Cameroun

La Banque soutient aussi le Plan d’investissement et le Programme d’actions prioritaires de la Commission du Sahel (2018-2030) et s’est engagée à hauteur de 1,3 milliard de dollars, sur un total de 3,41 milliards promis. Par le biais de procédures d’urgence ou de procédures accélérées, la Banque a mobilisé des fonds pour mettre fin à un massacre massif d’éléphants au Cameroun, au Tchad et en République centrafricaine. « Une de nos opérations majeures c’est avec la Comifac basée à Yaoundé avec qui on a beaucoup travaillé dans les aires protégées au niveau du Cameroun et des autres pays. Notre intervention pour le moment est plutôt régional mais le Cameroun inclut », précise Bamba Diop, Environnementaliste. Avec le soutien financier de la Banque africaine de développement, à travers la Facilité africaine pour l’économie circulaire (ACEF), et en collaboration avec l’Alliance africaine pour l’économie circulaire (ACEA), le Cameroun a amorcé sa transition vers l’économie circulaire pour une croissance verte durable.

Le 22 octobre dernier, le pays a annoncé le développement de sa feuille de route pour l’économie circulaire qui « … constitue un cadre nécessaire permettant à notre pays de réaliser ses priorités en matière de développement tout en restant en ligne avec ses objectifs en matière de développement durable et de changement climatique », soulignait à ce propos Paul Tasong, ministre délégué auprès du ministre de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire. L’économie circulaire offre au Cameroun une passerelle vers une croissance verte, transformant défis environnementaux et sociaux en opportunités durables. Elle favorise l’intégration de 25 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici 2035, en réponse aux impacts climatiques touchant 40 % des ménages vulnérables, et soutient la réduction de 35 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, conformément à sa Contribution nationale déterminée.

Partenariat

« On a besoin de financement pour sauvegarder la biodiversité. Et nous sommes une banque. Donc, nous sommes appelés à venir en soutien à nos pays », explique Ahmadou Bamba Diop, Chargé des projets. Les besoins sont énormes et la banque a besoin d’autres partenaires pour pouvoir augmenter les ressources d’intervention. « Les financements peuvent se faire sous forme de dons ou des prêts mais des prêts concessionnels. Maintenant, On essaie de faire intervenir le secteur privé. Eux, ils cherchent les return c’est-à-dire les bénéfices. Il va falloir les attirer et la banque joue ce rôle ». En faveur de la collaboration, l’expert en financement de la biodiversité, Candice Stevens, Fondatrice et PDG du Sustainable Finance Coalition, suggère cependant une réflexion approfondie sur les implications réelles de la cible 18 et à ce qu’elle signifie réellement en termes de diminution des subventions nuisibles et d’augmentation des incitations positives. Mais aussi dans la façon d’aborder les systèmes financiers traditionnels.

S’agissant de la cible 19 et aux énormes discussions qui ont lieu autour de la mobilisation des ressources, la Co-Chair IUCN WCPA Sustainable Finance Specialist Group, invite à réfléchir au rôle de chacun pour pouvoir commencer à agir en intégrant les préoccupations des gardiens des paysages terrestres et marins notamment dans les endroits les plus critiques du continent à la lumière de la cible 3 et des ambitions 30×30. Cet avis trouve écho dans l’appel lancé par Fred Kwame Kumah, vice-président l’African Wildlife Foundation, en faveur de l’intégration de la protection de la biodiversité dans la plupart des structures financières et l’incitation des gouvernements à donner la priorité à la protection de la biodiversité.

Nadège Christelle BOWA à Cali-Colombie

Ce reportage a été réalisé dans le cadre de la bourse 2024 CBD COP 16 organisée par Internews Earth Journalism Network

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