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Éradication de la poliomyélite: Le Cameroun fortement dépendant de l’aide extérieure

Alors que l’Oms planche sur la vaccination de routine pour définitivement éradiquer cette maladie invalidante, l’Etat ne finance qu’à hauteur de 5,3 milliards de Fcfa le budget prévisionnel du plan de transition 2017-2021 d’éradication de la poliomyélite au Cameroun qui s’élève à près de 37,5 milliards de Fcfa.

« Ce n’est pas le moment pour nous d’arrêter. Il faut continuer de la plus belle des manières. Si nous arrêtons maintenant, cette maladie reviendra au galop. Nous savons que beaucoup d’enfants n’ont pas encore été vaccinés ». Dr Michel Zaffran, Directeur de l’éradication de la poliomyélite à l’OMS plaide pour la poursuite des efforts en vue de l’éradication de la poliomyélite à travers la mise en œuvre systématique des campagnes de vaccination en partenariat avec tous les acteurs impliqués dans la lutte contre la polio. C’était le lundi 22 octobre 2018, lors de la conférence virtuelle mondiale sur le thème : « L’effort mondial d’éradication de la polio : est-il temps d’y mettre fin ? ».
Organisée par une industrie pharmaceutique en prélude la journée mondiale de lutte contre la poliomyélite, ce mercredi 24 octobre 2018, la rencontre virtuelle a réuni grâce à la magie technologique, des experts du Pakistan, d’Europe, d’Afrique et des États-Unis afin de plancher sur l’épineuse problématique de mettre fin aux efforts d’éradication de la polio. Elle s’est déroulée en simultanée à Paris en France et à Genève en Suisse, avec des journalistes y assistant en direct depuis Karachi au Pakistan, Nairobi au Kenya et Yaoundé au Cameroun au siège de Sos-médecin. « Nous sommes passés de plus de 200 000 cas de polio à 50 000 voire à une dizaine par an dans les pays endémiques. Nous ne devons pas relâcher les efforts maintenant. Nous devons continuer jusqu’à en finir avec la polio », insiste Dr Michel Zaffran.

vaccination contre la polio
Le Vaccin oral toujours important

Virus malin
La polio doit donc être éradiquer par tous les moyens. Le succès de ce plan ambitieux par la conjugaison des efforts. Mais davantage par l’administration des vaccins de façon récurrente. Dont, « le déploiement des vaccins », explique Dr Ibrahima Koné, en charge des questions techniques pour l’éradication de la polio et la vaccination de routine à l’Unicef. Selon l’Oms, l’action concertée des partenaires dont Sanofi Pasteur a déjà permis de déployer 6 milliards de doses de vaccins à travers le monde. Mais pour David Loew, directeur de Sanofi Pasteur, impliquée dans la recherche, le développement et le déploiement de vaccins contre la polio depuis plus de 40 ans pour produire la plupart des vaccins inactivés et oral utilisés dans le monde, le principal défi actuel réside dans la planification. « Les vaccins que nous allons déployer en 2023 doivent être développés aujourd’hui ». Difficile par conséquent pour la structure de développer des vaccins qui n’ont pas été commandés. « Nous sommes préoccupés parce que nous ne pouvons pas intervenir dans un délai très court dans la production et le déploiement des vaccins ».
Outre ce défi, la résistance ou méfiance des populations dans les régions endémiques et la porosité des frontières constituent des contraintes majeures à l’éradication de la polio. Tel est le cas au Nigéria voisin dont certaines localités sont occupées par Boko Haram. Au Cameroun, d’après André Mama Fouda, ministre de la Santé publique lors du lancement du plan de transition 2017-2012, en février 2018, l’Etat prendra ses responsabilités, et ne ménagera aucun effort pour conduire notre pays vers l’éradication totale de la poliomyélite. Cette volonté politique affichée ne semble cependant pas suffisante face aux contraintes notamment budgétaires. En effet, le budget prévisionnel de ce plan de transition 2017-2021 s’élève à près de 37,5 milliards de Fcfa. Mais, l’Etat ne le finance qu’à hauteur de 5,3 milliards. Par conséquent, le pays dépend fortement du financement extérieur. Ce qui pourrait affaiblir la vaccination de routine. Voire retarder l’adoption définitive du vaccin inactivé injectable dans les pays.

INTERVIEW

Dr Paulin Kouam
« Les campagnes de routine assurent l’immunité individuelle et collective »

Dr Paulin kouam
Dr Paulin Kouam, Chef District de santé de Malantouen -Cameroun

Le point de la situation de la poliomyélite avec le Chef district de santé (Cds) de Malantouen dans la région de l’Ouest Cameroun. Ce district de santé a fait parler de lui en totalisant 3 des 4 cas de polio enregistrés lors de la dernière flambée de l’épidémie.
Où en est le Cameroun dans sa lutte contre la poliomyélite ?
Le dernier cas lié au polio virus sauvage (pvs) date de juillet 2014. Donc, la polio au Cameroun relève du passé. Mais cela ne veut pas dire que la lutte ne continue pas. On pense qu’en 2021, ce chapitre de polio peut être définitivement clos avec la planification et la transmission des acquis. Ce que les anglophones appellent « polio legacy ».
Comment comprendre la poursuite des campagnes de vaccination de routine si le polio virus sauvage ne circule plus dans notre pays ?
Le Cameroun n’est plus exportateur de polio virus sauvage. Ce concept est né lors de la dernière épidémie où on a vu la même souche de virus en République Centrafrique. Certains l’ont aussi dit parlant du Brésil. Mais je n’en suis pas sûr. Donc, le même virus aurait été trouvé en dehors de nos frontières. Du coup le Cameroun avait été déclaré comme exportateur du Pvs. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui, puisque en avril 2015, après que le Cameroun ait été silencieux sur ce plan pendant plusieurs mois, le ministre de la Santé publique avait déclaré que le polio virus sauvage ne circulait plus dans le pays. Maintenant les campagnes de routine sont très importantes parce qu’elles assurent l’immunité individuelle et collective. Si on a 100% d’enfants vaccinés, on ne fera pas la polio. Et si on a aussi 90 à 95% d’enfants vaccinés, on est sûr que même si un individu rentre au Cameroun avec la polio, il ne pourra pas facilement transmettre aux autres puisqu’il existe déjà une immunité collective sur le terrain. C’est la raison d’être des efforts pour renforcer les campagnes de vaccination de masse qui se font deux fois par an et pour renforcer le Programme élargi de vaccination (Pev) de routine qui concerne les enfants de moins d’un an.
Le plan stratégique de lutte contre la polio vise l’objectif : éradication de la poliomyélite d’ici 2021. Comment assurer ce résultat lorsqu’on connaît la porosité de nos frontières ?
C’est pour cette raison que la lutte doit être collective. Il en est de même de la protection tant à l’intérieur du district de santé -unité opérationnelle- qu’à l’échelle régional, national ou sous-régional. C’est pour cela que vous avez souvent vu qu’on mène des campagnes synchronisées avec le Nigéria, la Centrafrique, le Tchad… parce que ces pays constituent un risque potentiel. Il y a le Bassin du Lac Tchad du côté du Nord. Il y a le Nigéria qui est encore endémique à la polio. Le risque est permanent. Mais nous sommes sûrs que nous évoluons vers l’éradication parce que dans ces pays aussi, des efforts sont consentis. Ils mènent aussi des campagnes de vaccination. De plus de 50 000 cas de polio dans le monde il y a quelques années, on en est à une dizaine dans certains pays aujourd’hui. Des efforts considérables sont faits.

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