Pr Hortense Gonsu : Sensibiliser la population sur la résistance aux antimicrobiens
Selon la Présidente de la Société Camerounaise de Microbiologie (SOCAMI), autant que les professionnels de la santé, les populations sont concernées par la lutte contre la résistance aux antibiotiques. Un phénomène en pleine croissance qui menace la santé publique. Hortense Gonsu est professeur de microbiologie à la FMSB-Université de Yaoundé I.
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En prélude à la JIM 2024, la Socami a organisé deux ateliers simultanés sur le Mpox et la Ram. Quel est l’intérêt de ces activités ?
Ces ateliers pré-congrès sur la résistance aux antimicrobiens (RAM) rentrent en droite ligne avec le thème général du congrès qui va commencer demain (ce jour, Ndlr). Le congrès (L’article sur les journées internationales de microbiologie (JIM 2024) disponible ICI) est axé sur la résistance aux antimicrobiens dans le contexte de One Health, une santé qui veut que la prise en charge des infections soit une prise en charge multidisciplinaire, multisectorielle à savoir : la santé humaine, la santé animale, la santé au niveau de l’environnement. C’est un tout ! On s’est rendu compte que le fléau de la résistance aux antimicrobiens ne peut être réellement pris en charge si on ne tient pas le taureau par toutes les cornes. D’où les échanges dans les différents secteurs de la microbiologie.
Vous parlez de résistance aux antimicrobiens, mais pour ceux qui ne comprennent pas, il s’agit de quoi exactement ?
Il s’agit du fait que, des bactéries qui étaient normalement sensibles à certains antibiotiques deviennent résistantes à ces antibiotiques pour plusieurs raisons. Notamment : l’utilisation inappropriée de ces antibiotiques. Soit on les utilise de façon abusive, soit ils sont en sous-utilisation. On peut les trouver partout dans la rue (accessibilité). Cette résistance aux antimicrobiens augmente au fil des années. Aussi, l’atelier pré-congrès sur la résistance aux antimicrobiens est une formation qui permet aux participants de comprendre comment se font les tests de sensibilité aux antibiotiques. Notre public cible sont les biologistes et pas les administratifs, pour qu’ils puissent restituer cette formation auprès de leurs collègues. A termes, on espère avoir des données de qualité. C’est-à-dire que lorsqu’on dit qu’une bactérie est résistante, qu’elle soit vraiment résistante parce que le technicien a bien manipulé. Nous avons invité les participants de toutes les régions du pays, pour que les tests de sensibilisation aux antibiotiques soient harmonisés puisque la surveillance va se faire au fil des années sur l’étendue du territoire.
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Quelle est la situation de cette résistance au Cameroun ?
En ce qui concerne l’état des lieux, je ne peux pas vous donner les chiffres exacts. Cependant des résultats montrent que c’est un phénomène qui est croissant. Au point où, l’OMS a déclaré que si d’ici 2050, rien n’est fait, on va avoir au moins 10 000 cas de décès dus à la résistance aux antimicrobiens. C’est un sujet d’actualité, et il faut trouver des mesures.
Que préconise l’OMS pour éviter la situation dramatique que vous décrivez ?
L’OMS recommande la mise en place dans tous les pays de cinq stratégies dont la première est l’information. Une mesure qui n’est pas budget dépendant (budgétivore) et consiste à sensibiliser la population sur le phénomène de la résistance aux antimicrobiens. Il y a la recherche ; l’hygiène en milieu hospitalier et en communauté. C’est très important parce que les bactéries multirésistants aiment bien le milieu hospitalier où, si l’hygiène n’est pas bien pratiquée, ces bactéries qui ont une façon particulière de transmettre leur gène résistant, vont continuer de le faire à d’autres bactéries qui ne sont pas résistants. Il y a le bon usage du médicament. La prescription est un gros problème. Les gens ne doivent plus s’approvisionner sur la rue ; Que les prescripteurs utilisent les guides pour prescrire les antibiotiques en cas d’infections. Heureusement le Cameroun a un guide de prise en charge des pathologies infectieuses en cours de dissémination. Il y a également le développement de nouveaux médicaments. De plus en plus les chercheurs utilisent testent l’effet antibactérien des plantes pour voir si certaines plantes du terroir sont efficaces contre certaines bactéries. C’est pour nous un espoir. Les antimicrobiens conventionnels ont montré leur limite.
Réalisée par
Nadège Christelle BOWA