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COP 16 : Greenpeace International demande aux pays riches de casser leurs banques et payer ce qu’ils doivent pour la protection de la biodiversité

Les manifestants de la zone bleue, ce lundi 28 octobre 2024, à Cali en Colombie craignent que le manque d’engouement des pays riches à respecter leur engagements pris en 2022 ne cause l’échec de la réalisation du Cadre mondial Kunming-Montréal comme ce fut le cas pour les objectifs d’Aïchi adoptés en 2010.

Il est un peu plus de 13 h (heure locale), à Cali en Colombie. Zone bleue, espace formel de conférences et de négociations géré par la Convention sur la Diversité Biologique (CDB), où se déroulent toutes les sessions officielles, les réunions, les événements parallèles et les conférences de presse, organisés pendant la COP16. Le soleil au zénith n’altère pas la détermination des activistes de Greenpeace International à faire passer leur message. Des banderoles, des pancartes et même une mélodie, sont déployées pour faire effet. L’attention de la foule qui se presse est captée et la presse s’invite pour s’enquérir de la situation. « Nous voulons interpeller les pays du Nord à respecter leur engagement par rapport au paiement des 20 milliards de dollars pour la protection de la nature et la restauration de la Biodiversité. La COP 16 est un moment décisif et nous voulons partir d’ici avec un engagement fort », laisse entendre rapidement Bonaventure Bondo, avant de rejoindre ses camarades dans les rangs de cette manifestation.

Lors de la COP 15, les pays développés se sont engagés à mobiliser 20 milliards de dollars par an pour soutenir les pays en développement dans la protection de leur biodiversité. Ce chiffre devrait atteindre 30 milliards d’ici 2030. Mais alors que Cali devrait juste permettre de renforcer ces promesses, en impliquant davantage les financements privés, très peu de pays ont déposé leur contribution à l’exception de quelques champions. « Il n’y a que la Norvège, la Suède et l’Allemagne qui ont payé leur 100% et plus de la part qui est due. Mais le reste des pays riches est très loin », fustige Irène Wabiwa Kyembwa, Responsable du Programme Biodiversité à Greenpeace International. « Les pays comme le Canada, la Grande Bretagne, le Japon, la Corée du Nord, etc. sont très loin. On se demande pourquoi ? Parce qu’on ne peut pas dire qu’ils n’ont pas d’argent. Ils ont de l’argent. Ils sont en train de payer des milliards et des milliards de dollars pour des subsides qui sont néfastes pour la nature. Nous leur demandons de mettre de l’argent sur la table aujourd’hui ici même à Cali »

De cet argent dépend la réalisation des objectifs du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal, adopté par 196 pays lors de la 15e Conférence des parties sur la biodiversité (COP15). « On ne peut espérer une bonne implémentation du cadre mondial Kunming-Montréal s’il n’y a pas d’argent. Et Il n’y a pas d’argent sur la table. Nous sommes presque à la fin de la COP mais nous manquons encore d’argent pour la protection de la biodiversité. Les communautés locales, les peuples autochtones sont en train de souffrir à travers le monde en raison de la crise climatique, les feux de brousse, les inondations… ils n’ont pas d’argent pour sauver notre nature et là nous sommes là pour demander aux pays riches de casser leurs banques et payer l’argent qu’ils doivent pour la protection de la nature », décrie-t-elle encore. Et d’ajouter toujours aussi véhémente : « La nature est en train de chauffer. Nous sommes en train de survivre sur cette planète et s’il n’y a pas d’actions concrètes et urgentes ici à la COP, notre futur est incertain. Dans quelques mois que nous allons entrer en 2025 ».

Le spectre de l’accord d’Aichi

Leur voix s’entendra alors que s’ouvre le segment de haut niveau ? L’espoir est permis. « On ne peut pas attendre. Les gens sont en train de mourir et si des actions concrètes ne sont pas prises maintenant, si l’argent n’est pas mis sur la table, nous allons continuer à vire la catastrophe et nous en avons marre. Voilà pourquoi, Greenpeace avec ses partenaires, sommes réunis ici à Cali pour demander aux pays riches de faire leur part. Ils ont promis à Montréal de nous donner de l’argent pour protéger la biodiversité dans les pays du Sud. Nous avons besoin de cet argent maintenant. On en a assez avec les discours, on en a assez avec les promesses. Nous voulons la concrétisation de ces discours ici et maintenant ». La pression est forte car, il plane le spectre de l’échec dans la réalisation des objectifs d’Aïchi. « Jusque-là on parle de 55% qui sont déjà payé. Mais il y a un déficit de plus de 45%. On ne veut pas revivre ce qu’on a vécu en 2010 où il y avait un accord Aichi et aucun des objectifs n’a été atteint parce qu’il n’y avait pas d’argent. Nous voulons une mise en œuvre de l’accord Kunming-Montréal dès maintenant ».

En 2010, dans le cadre de la Convention pour la diversité biologique d’Aïchi au Japon, les Nations-Unies s’étaient engagés sur vingt objectifs. Repris par les États membres dans leurs stratégies nationales pour enrayer l’érosion mondiale de la biodiversité tel que démontré par le WWF dans différents rapports sur l’état de planète. A l’heure du bilan, le constat amer et décevant d’un échec dû au manque de volonté politique, des difficultés à opérer des choix courageux et insuffisance de mobilisation des populations à travers la planète. Les manifestants craignent un remake et anticipent en interpellant les dirigeants mondiaux sur cette préoccupation. « Nous sommes un nombre important de personnes, pas de dirigeants mais les peuples autochtones, les femmes, les jeunes…pour demander à ces leaders d’écouter la voix du peuple et faire ce qu’il y a de mieux pour la nature. Ils ne peuvent être dirigeants que s’il y a un peuple qui est en bonne santé, qui a accès à une bonne nature, une bonne source d’eau… ».

Pour Greenpeace, la contribution domestique est importante. Mais pour être explorée, il faut une stratégie nationale que seuls quelques pays (36 selon les statistiques actualisés du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique (CDB), ont réussi à déposer. « Or pour avoir une Stratégie, il faut avoir des fonds. Mais cet argent, les pays pauvres vont le trouver où si les riches ne veulent pas faire leur part ? Ils ont eu à détruire la biodiversité pendant des années, c’est le moment de pouvoir payer pour leur responsabilité. On ne demande pas un acte de charité. Ils doivent mettre de l’argent sur la table pour que les pays du Sud puissent contribuer dans la protection de la biodiversité et que nous ayons une planète vivable », conclut Irène Wabiwa Kyembwa.

Nadège Christelle BOWA à Cali-Colombie

Ce reportage a été réalisé dans le cadre de la bourse 2024 CBD COP 16 organisée par Internews Earth Journalism Network

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