Foire paysanne : Les femmes d’Afrisc-Campo montrent leur savoir-faire en agroécologie
Les femmes de l'Association Afrisc-Campo ont organisé les 12 et 13 décembre 2024, une foire paysanne pour montrer leur savoir-faire en matière d'agriculture, pisciculture...Une manière pour elles de montrer aux yeux du monde que la transition vers une économie diversifiée se passe plutôt bien malgré quelques défis.
Bien avant le top départ donné par le délégué d’arrondissement du ministère de l’Agriculture et du Développement rural (Minader), après un discours bien élaboré, la population cachant mal son impatience a investi l’esplanade de l’école publique bilingue inclusive de Campo dans le département de l’Océan, région du Sud au Cameroun. C’est ici que se déroule pour deux jours, la 2e édition de la foire paysanne organisée par les membres de l’Association Afrisc-Campo grâce à l’appui de Green Development Advocates (GDA), en partenariat avec l’Ambassade de France au Cameroun et des organisations telles que : Global Alliance for Green an Gender Action (GAGGA), Land is Life, Synchronicity Earth, sous le thème : « Femmes et jeunes : gardiens de nos semences et acteurs de la promotion de l’agroécologie durable à Campo ». Outre, la variété des espèces de poissons frais et fumé, de viandes de bœuf et de porcs, la particularité de cette foire réside dans la présentation par les exposants, de nombreux produits issus de l’agriculture comme le souligne à suffisance, le thème de la foire.
Pour le bonheur des clientes, sur les étals ou à même le sol nu de la cour, des produits transformés à base de tubercule de manioc (bâton de manioc ; miondo, tapioca jaune et blanc) ; de la banane-plantain fraîchement sorti des champs ; des arachides, frais, sec et cuit ; diverses variétés de graines de concombre localement appelés pistaches décortiqués ou non ; des ignames, du macabo, du melon, des tubercules de manioc, etc. Mais aussi de la volaille, notamment de la variété dite « poule du village » en opposition au poulet de chair ; des épices donc le djansan ; des produits issus de la pharmacopée traditionnelle transformés ou frais ; des liqueurs à base produits locaux et même des produits cosmétiques et de ménages, etc. fabriqués par ces femmes et jeunes dont certains sont venus de Souza, Mintom et même du Grand Mbam, en renfort. Puisque l’Afrisc a une implantation nationale. « Je viens de Lolodorf. Je fais surtout dans les produits halieutiques. Avant cette foire, nous avons participé à une formation qui a duré trois jours, où on a appris aux femmes à fabriquer des produits que vous avez vus là », confie Philomène Mpfoun, installée désormais à Campo et membre d’Afrisc dont l’étal présente une variété de poissons fumés.
Transformation
« Nous faisons des livraisons même à l’extérieur de Campo notamment à Douala ou à Yaoundé selon les commandes que nous recevons ». Mais pour l’heure confie-t-elle, les prix comparés aux autres saisons sont un peu à la hausse. « Si les prix sont un peu chers, c’est parce que c’est la saison des carpes que les pêcheurs se concentrent plus à pêcher et qu’ils revendent directement à la Guinée Equatoriale qui sont de gros clients, comparé à nous. Puisque nous n’avons pas de clients sûrs pour ces produits. Donc actuellement, c’est très difficile d’avoir les bars, les capitaines et les soles ». Quoi qu’il en soit, les prix sur le site de la foire, semblent plus abordable que sur le marché local, selon une cliente qui ne s’est pas fait prier pour remplir son panier à ras bord, se promettant de revenir le lendemain, en raison de l’interruption pour cause d’ouverture solennelle de la foire par les officiels. « Je dois aller chercher les enfants à l’école », s’excuse-t-elle. Au sujet des prix, plusieurs visiteurs sont du même avis, d’autant plus que la présence du ministère du Commerce à travers son service déconcentré, rend plus accessible également les produits de premières nécessités.
« Je suis très fier de l’organisation de la foire paysanne à Campo. C’est comme si j’ai gagné quelque chose qui me manquait depuis. C’est vrai que par rapport à l’édition passée, on a vu la population se mouvoir pour cette foire. On a vu les paysans, les agricultrices se mouvoir pour organiser cette fête. Je suis véritablement très fier d’eux et je les encourage dans cet élan pour que à Campo vive véritablement l’agriculture », a déclaré Béni Bekono Belinga, Délégué d’arrondissement Minader-Campo au terme de la visite des stands. Une foire réussie en dépit des défis environnementaux vécus par les femmes de cette association. Parmi ces défis, on note l’accès limité à des technologies appropriées, telles que des outils et machines nécessaires pour transformer efficacement les Produits forestiers non ligneux (PFNL) dont les communautés locales sont fortement dépendantes. De plus, le manque de formation technique sur l’utilisation et l’entretien de ces machines, ainsi que sur les techniques de transformation, entraîne une dépendance à des méthodes artisanales peu efficaces. Afin de renforcer les compétences des femmes et jeunes filles de l’association AFRiSC-Campo dans la transformation et la valorisation efficace des PFNL et autres produits agricoles, GDA et ses partenaires leur ont remis du matériel. Ce don a été précédé d’une formation combinant théorie et pratique, pour favoriser l’engagement des participantes. Cependant, « on manque juste de soutien technique et financier pour mettre en pratique, ce que nous apprenons », affirme Careme Mpfoun qui plaide pour davantage d’appuis.
Nadège Christelle BOWA
De retour de Campo
REACTIONS
Béni Bekono Belinga, Délégué d’arrondissement Minader
Les habitants de Campo s’intéressent peu à peu à l’agriculture
On sait que les côtiers sont de bons pêcheurs. Pour eux, abandonner la pêche pour se lancer dans l’agriculture qui prend du temps n’est pas facile. En plus, le parc est à côté pour la chasse. Cependant, la tendance est en train de changer. La terre est fertile. Les habitants de Campo s’intéressent peu à peu à l’agriculture, malgré les défis liés à la présence des pachydermes qui détruisent les plantations. On supplie l’Etat de trouver des solutions pour les producteurs dans ce conflit homme-faune.
Marie Clarissa Kengmo, GDA
Nous voulons renforcer l’autonomisation des femmes
A travers la foi paysanne, nous voulons renforcer l’autonomisation des femmes riveraines des grands projets. Comme elles ont été en partie privées des ressources naturelles qui les entourent, on veut les amener à mener d’autres activités en parallèle, qui vont soutenir la vie quotidienne. En dehors de la ressource forestière, l’agriculture est un autre moyen pour augmenter les moyens de subsistance des communautés. Les femmes de Campo sont très dynamiques à travers les formations dont elles bénéficient. Elles ont amélioré leur leadership.
Marlyse Nadège Mengue Medjo, présidente Afrisc-Campo
Qu’on nous permette de travailler en nous cédant nos terres
La femme de Campo est engagée, non seulement à faire les études, mais à travailler avec la force que Dieu lui a donnée, pour que vive tout le monde entier. Mais, quand je vois ce qui est exposé, je me dis que les femmes se donnent déjà, mais pas suffisamment. Mais elles ont promis de se donner suffisamment à partir de cet instant. Les femmes qui veulent faire l’agriculture à Campo ont un problème d’espaces, occupés, non seulement par les animaux, mais aussi par les exploitants forestiers et d’autres agro-industries. Notre plaidoyer est qu’on nous permette de travailler en nous cédant nos terres.
Joséphine Minko Epse Mété, exposante
C’est pour nous une grande chance
Je suis la Première femme de la chefferie de Malaba. Je suis venue exposer ici mon pistache et le nd’o (graine d’amende, Ndlr) à la foire de Campo. Ce n’est pas la première fois. C’est pour nous une grande chance. J’ai des ignames en grande quantité. GDA nous a fait du bien. Je dis grand merci au GDA, grand merci pour nos enfants et nos frères qui sont venus nous soutenir. Ici on ne connaissait pas faire les champs, on ne connaissait pas élever les poules, etc. Mais ce n’est plus le cas.
Rassemblées par NCB