Genre et santé face aux polycrises en Afrique de l’Ouest : l’urgence de renforcer les systèmes de santé
L'Afrique de l'Ouest est de plus en plus confrontée, davantage en ce début de siècle particulièrement agité, à une série de crises interconnectées, souvent désignées sous le terme de « polycrises », qui incluent des défis environnementaux, sanitaires, économiques, politiques et sociaux. Dans ce contexte complexe, les questions de genre et de santé prennent une dimension décisive. Cet article de Baltazar Atangana, expert en genre, explore comment les inégalités de genre aggravent les problèmes de santé dans cette région et comment ces dynamiques sont exacerbées par les crises multiples.

Les inégalités de genre et leur impact sur la santé
Les inégalités de genre en Afrique de l’Ouest sont profondément ancrées dans les structures sociales et économiques. Les femmes dans la région sont souvent confrontées à des obstacles significatifs en matière d’accès aux soins de santé, à l’éducation et aux ressources économiques1. Par exemple, les taux de mortalité maternelle restent alarmants, en raison non seulement de l’accès limité aux soins prénatals, mais aussi de la discrimination systémique qui empêche les femmes de prendre des décisions concernant leur santé reproductive.
L’impact des crises économiques sur la santé des femmes est également préoccupant. La pandémie de COVID-19 a exacerbé les inégalités existantes, avec des diminutions significatives des services de santé reproductive et maternelle. De nombreux pays d’Afrique de l’Ouest ont observé une augmentation des grossesses non désirées et des avortements clandestins, mettant en péril la vie et la santé des femmes2.
Polycrises et vulnérabilité accrue des populations
Les polycrises en Afrique de l’Ouest, qui incluent des conflits armés, des catastrophes environnementales et des crises économiques, augmentent la vulnérabilité des populations, en particulier des femmes et des filles. Les déplacements forcés dus à des conflits ou à des catastrophes climatiques entraînent souvent des situations où les droits des femmes sont bafoués, et où l’accès aux services de santé se réduit encore davantage. En période de crise, les systèmes de santé, déjà fragiles, sont souvent submergés, et les services spécifiques aux femmes sont parmi les premiers à être affectés.
De plus, la violence basée sur le genre, qui est déjà un problème majeur en temps normal, s’intensifie souvent pendant les crises. Un rapport de l’UNICEF3 souligne que les taux de violence domestique et de violences sexuelles augmentent dans les contextes de conflit et d’insécurité, rendant les femmes encore plus vulnérables. Les conséquences sur la santé mentale des femmes sont également significatives, avec des taux d’anxiété et de dépression en forte augmentation.
Soutenir les systèmes de santé locaux
La situation en Afrique de l’Ouest face aux polycrises met en lumière la nécessité d’une approche intersectionnelle4 qui prend en compte les dimensions de genre dans les interventions sanitaires. Renforcer les systèmes de santé pour qu’ils soient plus inclusifs et accessibles aux femmes est essentiel pour améliorer les résultats de santé dans la région. Les politiques doivent non seulement viser à atténuer les impacts des crises, mais aussi à promouvoir l’égalité entre les sexes comme un élément clé de la résilience communautaire.
De manière opérationnelle, nous proposons de développer des programmes de formation pour les professionnels de santé sur les questions de genre et de santé, afin de mieux répondre aux besoins spécifiques des femmes et des filles de la région. De plus, nous recommandons de mettre en place des mécanismes de financement innovants5 pour soutenir les systèmes de santé locaux en les rendant moins dépendants aux financements de l’étranger6 et permettre une réponse rapide et efficace aux crises de plus en plus marquées en ce début de siècle brutaliste.
Baltazar ATANGANA
noahatango@yahoo.ca