Jacques BOYER:« Nous encourageons une alimentation adéquate du nourrisson et du jeune enfant »
Selon le représentant de l’Unicef au Cameroun, une mauvaise alimentation peut avoir des conséquences irrémédiables sur le développement du cerveau de l’enfant. Jaques Boyer parle également des actions menées par cette organisation en faveur d’une alimentation appropriée du nourrisson camerounais.
Quelle importance revêt pour vous la célébration de la Semaine mondiale de l’allaitement maternel ?
Chaque année, la première semaine du mois d’août permet à l’Unicef de pouvoir rappeler l’importance de l’allaitement maternel pour le nourrisson et le jeune enfant. Au Cameroun, il n’y a que 28% d’enfants qui sont allaités exclusivement au sein pendant les six premiers mois de leur vie. A cela, il y a plusieurs raisons : des pratiques traditionnelles qui font que les mamans pensent qu’il est important d’introduire d’autres aliments notamment de l’eau dans l’alimentation de l’enfant de moins de six mois. Egalement des aspects plus commerciaux qui font que certaines compagnies font la promotion des substituts du lait maternel et qui encouragent la consommation de ces substituts par les nourrissons et les jeunes enfants de moins de six mois. Malgré le fait que le Cameroun ait une législation qui régularise l’utilisation et la vente de ces substituts du lait maternel. L’autre information importante est que, il n’y a que 21% de nouveaux nés qui sont mis au sein dès la première heure de leur vie. Hors le premier lait qu’on appelle le colostrum est un produit particulièrement important car il favorise l’immunité des enfants contre de nombreuses maladies. Si on ne donne pas ce premier lait aux enfants, ils sont plus vulnérables à toutes ces maladies. Donc cette semaine est importante parce qu’elle nous permet de rappeler ces messages.
A qui s’adressent ces messages ?
Ces messages s’adressent en priorité aux mamans, mais également à la famille élargie. On sait parfois que certains membres de la famille notamment les belles-mères (sourires), sont des facteurs parfois de mauvaises aux informations aux jeunes mamans. Ce message s’adresse aux décideurs car comme je l’ai fait remarquer, il y a une très bonne législation au Cameroun, mais le reste de cette législation mérite d’être renforcé.
Quelles sont les actions menées par Unicef pour promouvoir l’allaitement maternel ?
Les actions de l’Unicef ne se limitent pas l’allaitement maternel. Comme vous le savez, nous avons un programme de coopération avec le gouvernement camerounais. Et dans le cadre de sa composante nutrition, nous avons toute une série de promotion de la lutte contre la malnutrition. Ça va de la malnutrition chronique qui affecte malheureusement plus d’un tiers des enfants au Cameroun à la prise en charge des cas de malnutrition aigue et sévère y compris quand il y a des complications médicales. Nous encourageons donc une alimentation adéquate du nourrisson et du jeune enfant et l’allaitement maternel, notamment l’allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois. Et l’introduction d’aliments appropriés en complément du lait maternel après six mois que nous incluons dans ce que nous appelons l’alimentation du nouveau né et du jeune enfant, plus connue sous l’acronyme de « ANJE ».
Pour le moment, il n’y a pas de Stratégie nationale autour de l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant. Le gouvernement camerounais a organisé récemment avec l’appui de tous ses partenaires un atelier de lutte contre la malnutrition chronique. L’un des résultats de cet atelier est la formulation d’une Stratégie nationale pour l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant, ce qui va nous permettre évidemment d’avoir des actions encore plus fortes pour tout ce qui est promotion de la bonne nutrition mais particulièrement de l’allaitement maternel exclusif. Pour ce faire, tout le travail au niveau du cadre normatif, les politiques, les stratégies, les plans, c’est une condition sine qua non, mais au final, les mamans sont dans les communautés, dans leurs familles et donc, nous avons aussi toute une partie de nos activités qui vise l’information, l’éducation, l’adoption des comportements appropriés au niveau de nos communautés prioritaires. Et notre programme de coopération a quatre régions prioritaires que sont les trois régions du septentrion et la région de l’Est. Mais il y a d’autres partenaires qui apportent leur appui au gouvernement, qui ont des actions dans les autres régions du pays.
Quelles sont les retombées de l’allaitement maternel sur les plans économique et social ?
La principale retombée est sanitaire. Si un enfant a une bonne alimentation dès la naissance, il est mieux armé pour faire face aux maladies. Mais l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant notamment pendant les 1000 premiers jours de sa vie est particulièrement importante pour son développement cognitif. Une mauvaise alimentation peut avoir des conséquences irrémédiables sur le développement du cerveau de l’enfant. Donc, il sera moins apte à étudier. Sur le plan économique, des études prouvent que si l’on investi un dollar sur la promotion de l’allaitement maternel exclusif- l’allaitement de l’allaitement maternel est gratuit, c’est le lait de la maman. Mais la promotion a un coût, un dollar investi dans ce domaine maintenant peut avoir 35 dollars de retombés économiques quand l’enfant grandi. Donc, ça vaut la peine d’investir un dollar sur la promotion et l’encouragement des mamans à nourrir leur enfant exclusivement au sein. Par la suite, cela peut permettre de faire des économies de 35 dollars sur sa santé, son éducation et sur ces activités. Nous sommes là pour apporter notre appui. Cela fait parti de nos priorités. La lutte contre la malnutrition chronique est une priorité du gouvernement, c’est une priorité de l’Unicef. Et l’allaitement maternel exclusif s’inscrit dans le cadre de la lutte contre la malnutrition chronique.