Mezom Melouta: « Notre école forme le citoyen du fameux village planétaire de Mc LUHAN »
A cause du Covid-19, le système éducatif camerounais est obligé de faire sa mue. Des propositions fusent de toute part à l’effet de permettre aux apprenants de recevoir une éducation de qualité malgré le contexte sanitaire très peu propice aux formations en présentiel. C’est dans cette mouvance qu’à l’occasion de la rentrée académique qui aura lieu le lundi 2 novembre, l’Ecole Supérieure des Techniques avancées pour le développement (ESTAD) va être portée sur des fonds baptismaux. Son promoteur, Mezom Melouta, Ingénieur en Technologies de l’Information et de la Communication, explique les contours de ce projet qu’il nourrit depuis des années.
Vous êtes porteur d’un projet d’Ecole de formation en ligne dans le domaine de la technologie. Comment est venue l’idée de l’école ?
Cette idée date de 1992 lorsque, étudiant à l’Ecole Nouvelle d’Ingénieurs en Communication à Lille en France (ENIC), j’ai suivi mes premiers cours dans l’amphithéâtre Shannon, complètement équipé de caméras automatiques, mais surtout connecté à d’autres salles distantes situées à l’intérieur de la France, mais surtout dans d’autres pays comme le Japon, le Canada ou les Etats Unis. Aujourd’hui, cette école s’appelle Mines-télécom Lille et le système complexe a été simplifié, il ne reste plus qu’un studio virtuel et l’école a d’ailleurs breveté son projet sous le nom de Coralia je crois… En réalité, c’est en observant le mur inexorable vers lequel s’avance l’humanité, que j’ai compris qu’il était nécessaire de penser réellement à un système d’enseignement nouveau, qui permettrait réellement à l’homme de recouvrer sa liberté d’apprendre ou d’enseigner, à n’importe quel âge et à n’importe quel lieu. Aucun pays au monde ne peut dans quelques décennies faire face à la demande en infrastructure de type bâtiments d’accueil pour les systèmes d’éducation.
L’ESTAD donne des cours à distance, mais d’autres s’y lancent, en quoi êtes-vous différent ?
Il ne s’agit pas d’un effet de mode, notamment celle dictée par la pandémie à COVID 19. Notre projet a eu un temps de maturation important et Ayant été un produit de ce type d’école et, expert en TIC, nous avons eu le temps de penser aux solutions les meilleures pour dispenser l’enseignement à distance. En effet, beaucoup s’y lancent par nécessité, mais nous y sommes par conviction ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’enseignement à distance n’est pas pour nous seulement un outil au sens utilitaire du terme, mais un champ à explorer avec toutes les autres sciences, en vue d’en faire champ de recherche toujours plus performante au service de l’enseignement. C’est d’ailleurs dans ce sens que nous sommes résolument engagés aux côtés du MINESUP pour mettre en synergie toutes nos expertises en vue d’explorer ce vaste champ de recherche qui touche à la fois la communauté éducative (parents, étudiant, Etat) mais aussi les techniques et les technologies dans l’optique de soulager l’humanité toute entière.
Quelles sont vos cibles ?
Il y a naturellement ceux qui désirent obtenir un diplôme national, mais aussi ceux qui, de plus en plus nombreux veulent étudier en travaillant ou changer de métiers. Pour 2020-2021, nous leur offrons des cours dans trois les filières : Génie informatique (Génie logiciel, Infographie et web-design, maintenance des systèmes informatiques, informatique industrielle et automatisme, e-commerce et marketing numérique, banque et finance) ; Réseaux et télécommunication (Spécialités télécommunications et Réseaux et sécurité) ; génie électrique (électrotechnique, maintenance des systèmes électroniques, énergies renouvelables).
Qu’est ce qui garantit la qualité de vos formations ?
Le concept de cette école est contenu dans son nom. Si le qualificatif « Supérieure » pour certains est une simple classification administrative, à l’ESTAD, c’est en réalité un état d’esprit, un lien intime avec la qualité de l’encadrement que nous voulons donner à nos étudiants. Il rappelle à tous l’exigence de qualité, la quête permanente de la perfection, exigée tant du personnel, du corps enseignant que des étudiants eux-mêmes. Le corps enseignants est un mixte entre les exigences minimales du MINESUP et celles auxquelles sont astreintes les enseignants évoluant en international. Il en est de même du brassage entre les étudiants des différents pays, qui amène rapidement vers une prise de conscience des niveaux de connaissance aux standards internationaux. Ce que le Ministre d’Etat appelle l’excellence académique. La preuve, nos enseignants viennent des meilleures universités à travers le monde telles qu’Oxford. Pour nous, si le noyau des enseignements est le formidable travail abattu par le MINESUP en matière des curricula, nous opérons une ouverture de ceux-ci vers le monde, car le champ de compétition de nos enfants sera désormais le monde entier, malgré les replis identitaires. La science est universelle.
Le groupe de mots « Techniques Avancées », renvoie au fait que nous allons donner à nos étudiants, les techniques et technologies les plus proches de l’état de l’art dans chaque discipline. Enfin le qualificatif « pour le développement » indique notre volonté à faire de l’accès à la connaissance, non pas une accumulation stérile de savoirs, mais des savoirs qui permettent d’améliorer la vie de l’homme là où il se trouve, nous pourrions ajouter hic et nunc. La décentralisation est pour ainsi dire le concept qui sied le mieux au déploiement de nos étudiants, où qu’ils se trouvent. Mais attention, il ne s’agira pas seulement d’avoir des têtes bien pleines, mais aussi et surtout de remettre au centre de la formation, ce qui fait la différence entre deux personnes de mêmes références académiques : les valeurs éthiques. Nous formons tout l’homme pour qu’il soit capable de prendre en main ses responsabilités dans ce monde. Ce que je viens de dire implique, sans être exhaustif, que nul besoin de s’expatrier ou d’entrer absolument dans telle ou telle école prestigieuse, fut-elle nationale ou internationale pour avoir une éducation de qualité. On pourrait paraphraser cette formule qui a fait le succès des dragons d’Asie « Apprends où tu veux, quand tu veux, à l’Age que tu veux et comme tu veux …» Notre école forme le citoyen du fameux village planétaire de Mc LUHAN, car l’étudiant de nationalité tchadienne, peut bien avoir en temps réel, pour camarade de son groupe de TD [travaux pratiques, Ndlr], un étudiant de la Papouasie Nouvelle Guinée…
Les cours sont offerts en ligne, qu’allez-vous faire dans un contexte ou la fracture numérique est encore énorme ?
C’est le rôle des technologues que nous sommes ; vous pouvez me croire, nous avons déjà des solutions à ce type de problème. J’ai aussi une question : Est-ce parce que le taux d’analphabétisme est élevé en Afrique en général que le téléphone Android n’est pas utilisé en zone rurale ? Cependant, tout est perfectible. Cela me permet de dire un mot sur l’esprit de cette école, de ses étudiants et de ses dirigeants : Quand l’homme de foi veut faire quelque chose, l’univers tout entier se met à son service…la devise de l’école est « Crede et quod vis fac » (Cf. St Augustin), traduction, « crois et fais ce que tu veux ». Je demande tout simplement aux étudiants de venir vite découvrir au Palais des Congres, ce qui va petit à petit devenir l’école du futur, sans frontière ni barrière, l’école de leur temps.
Réalisée par
Nadège Christelle BOWA