Nourrissons et enfants exposés à des intoxications au plomb
Saturnisme
Très présent dans notre environnement quotidien, l’ingestion ou l’inhalation de plomb peut provoquer chez les jeunes enfants des cas de saturnisme, maladie grave qui entraîne des retards psychomoteurs. Ce métal toxique est utilisé dans la fabrication de certains jouets pour enfants. Un désastre !
« Nos enfants meurent à petit feu à cause de nous. On peut penser faire du bien à son enfant en lui offrant le meilleur jouet. Mais ce qu’il faut savoir c’est que nous donnons à cet enfant du poison sans le vouloir », Stéphanie Penandjo, directrice exécutive par intérim de l’organisation Jeunes volontaires pour le Développement (JVE) attire l’attention des parents et futurs parents à l’occasion d’un atelier de sensibilisation des parties prenantes sur les produits chimiques nocifs contenus dans les jouets pour enfants organisé le 31 janvier 2024 à Yaoundé, avec soutien technique du Centre régional IPEN pour l’Afrique francophone et l’appui financier de l’Organisation Mondiale la Santé. Selon l’OMS, le plomb est responsable de 600 000 nouveaux cas d’insuffisance intellectuelle chez les enfants chaque année. Bien qu’il soit interdit depuis les années 1990 dans de nombreux pays, le plomb est encore présent dans certains pigments et matériaux, utilisés dans des jouets.
Même à faible dose, l’ingestion ou l’inhalation du plomb peut avoir divers effets toxiques aigus (anémie, troubles digestifs) et chroniques (atteintes du système nerveux). Les enfants, et plus particulièrement ceux âgés de moins de 6 ans, ainsi que les femmes enceintes constituent la population la plus exposée au risque d’intoxication par le plomb. Les jouets pour enfants sont des sources d’intoxication potentielle notamment lorsqu’ils sont recouverts de peinture. « Les enfants seront contaminés pendant l’utilisation. Il est extrêmement difficile de contrôler les enfants lorsqu’ils s’amusent avec les jouets », explique Achille Ngakeng, Coordonnateur Régional du Hub IPEN Afrique Francophone. Cette intoxication, appelée saturnisme, entraîne des troubles à l’acquisition de certaines fonctions cérébrales supérieures et peut être la cause de retards intellectuels, de difficultés d’apprentissage, de troubles psychomoteurs, de troubles de l’attention, d’irritabilités, de troubles du sommeil et même d’un ralentissement de la croissance.
Renforcer la réglementation
En juillet 2020, l’UNICEF a publié un rapport précisant comment l’exposition des enfants au plomb compromet leur avenir. Ce Rapport intitulé « La vérité toxique: L’exposition des enfants à la pollution par le plomb compromet une génération future » révèle qu’1 sur 3 enfants – jusqu’à environ 800 millions dans le monde – ont du plomb dans le sang à des niveaux égaux ou supérieurs à 5 microgrammes par décilitre (μg/dL). Ces enfants grandissent en inhalant de la poussière et des fumées provenant du recyclage informel des batteries usagées au plomb, des opérations des fonderies à ciel ouvert, des aliments qui se trouvent contaminés par le vernis au plomb des poteries ou les soudures des cannes de conserve… Par ailleurs, les parents dont les professions impliquent le travail avec du plomb ramènent souvent de la poussière à la maison sur leurs vêtements, cheveux, mains ou chaussures, exposant ainsi par inadvertance leurs enfants aux substances toxiques. Les enfants de moins de 5 ans ont le plus grand risque de subir des dommages neurologiques, cognitifs et physiques à vie et même la mort par empoisonnement au plomb.
L’atelier de Yaoundé visait donc à : Attirer l’attention de l’opinion publique et sensibiliser les parents sur risques liés à la présence de plomb dans certains jouets et autres produits pour enfants ; Promouvoir l’achat de jouets garantis sans plomb ; Inciter les autorités à renforcer les réglementations sur le plomb dans les produits destinés aux enfants. « En tant que société civile, ce que nous pouvons faire aujourd’hui c’est la sensibilisation à travers les réseaux sociaux et les médias. Toutefois, les organisations de la société civile pourraient se mettre ensemble pour un plaidoyer en direction des pouvoirs publics afin qu’un accent particulier soit mis sur cette problématique liée à l’exposition du plomb », a déclaré Stéphanie Penandjo. En octobre 2023, à l’occasion de la Semaine Internationale de Prévention du Saturnisme, cette organisation s’est engagée dans des actions de sensibilisation grand public sur les risques liés à la présence de plomb dans les jouets et objets pour enfants.
Nadège Christelle BOWA