Protection des Espèces menacées : WildAid veut sauver le pangolin du Cameroun
Sous le slogan « Disons NON à la viande de pangolin », la campagne menée en collaboration avec le gouvernement, vise à faire prendre conscience du rôle précieux des pangolins dans le maintien d’un environnement sain. Elle souligne également le rôle clé que le Cameroun peut jouer dans la protection des pangolins et montre comment le pays peut devenir un leader de la conservation en Afrique.
Chaque année en Afrique et en Asie entre 100 000 et plus de 2,5 millions de pangolins sont prélevés dans la nature. À ce rythme, « la biodiversité risque de connaitre une triste fin. Il est de notre devoir de les protéger », interpelle Jennifer Biffot, représentante de l’Afrique francophone de WildAid, au nom de Peter Knights, fondateur et président de cette organisation à but non lucratif dont la mission est de mettre fin au commerce illégal des espèces sauvages, en concentrant ses efforts sur la réduction de la consommation mondiale de produits issus de la faune sauvage. S’agissant du pangolin, objet de la campagne que cette organisation vient de lancer en partenariat avec le ministère des Forêts et de la Faune (MINFOF) et le ministère des Sports et de l’Education Physique (MINSEP), l’on apprend que les populations des huit espèces de pangolins sont en voie d’extinction. Les pangolins se reproduisent lentement et ne peuvent avoir qu’un seul petit tous les 18 mois.
Le Cameroun est un habitat clé pour trois espèces, le pangolin géant, le pangolin à ventre blanc et le pangolin à ventre noir. en dépit de la législation en vigueur, «…toutes sont confrontées à des menaces croissantes dues au braconnage, à la déforestation et à la perte d’habitat », regrette Joseph Lekealem, directeur de la Faune et des Aires protégées au Minfof. En 2017, dans le cadre de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), des pays ont voté majoritairement pour interdire le commerce international du pangolin. Suivant cette décision, le Cameroun a interdit la chasse, la capture, la mise à mort et le commerce de toutes les espèces de pangolins dans le pays, ainsi que tout commerce international. Rien n’y fait. La consommation de viande de pangolin et d’autres formes illégales de viande de brousse reste très répandue dans les villes camerounaises.
Au-delà d’une viande ou des écailles
Une enquête menée par WildAid et le Groupe d’Action sur la Viande de Brousse en Afrique Centrale (CABAG) a révélé que le pangolin est la deuxième forme de viande de brousse la plus fréquemment consommée après le porc-épic, avec 49 % des consommateurs de viande de brousse dans les villes de Douala et Mbalmayo. Une tendance que cette organisation veut inverser à travers une campagne de sensibilisation. L’objectif principal, renseigne Jennifer Biffot, est d’informer les populations urbaines sur le statut de cet animal qui a un rôle écologique important. En effet, en se nourrissant des fourmis et des termites, il protège les plantations de leurs ravages. « Ce sont de telles informations que nous souhaitons partager pour que les populations prennent conscience de ce rôle et qu’elles voient au-delà d’une viande ou des écailles, ce rôle et l’importance de protéger cet animal qui est une espèce emblématique au Cameroun ».
Mais beaucoup de gens ne sont pas conscients des menaces qui pèsent sur les pangolins ou du rôle qu’ils jouent dans le maintien d’un environnement sain. Les résultats d’une étude présentée par Simon Denyer, Senior consultant à WildAid, révèle qu’une majorité écrasante de camerounais (93%) était fière que les pangolins existent au pays. cependant, seuls 29% des répondants savent qu’il est illégal de tuer et de commercialiser toutes les espèces de pangolins conformément à la loi de 2017 protégeant les pangolins dont la connaissance est très faible.
Du soutien et des résultats
Le consultant semble toutefois confiant. « Il est très encourageant de voir à quel point les Camerounais sont fiers de leur incroyable faune sauvage, et plus particulièrement des pangolins ». Il ajoute : « Les gens ici ont vécu en équilibre avec la nature depuis d’innombrables générations, et il est vraiment important de rétablir cet équilibre naturel, avant qu’il ne soit trop tard ». Sous le slogan « Leur liberté, Notre sécurité », la campagne vise également à sensibiliser aux risques sanitaires du commerce illégal de viande de brousse dans la propagation de zoonoses dangereuses, telles que le VIH, l’Ebola, le SRAS, la fièvre de Lassa, la variole du singe et le COVID-19.
Des légendes du football à l’instar de Rigobert Song, Roger Milla et Patrick Mboma soutiennent la campagne. Il en est de même des musiciens Stanley Enow et Locko, et l’artiste Toh Bright. Ils espèrent inciter les Camerounais à protéger l’incroyable faune sauvage du pays pour les générations futures. Les précédentes campagnes de WildAid ont contribué à une réduction de 80 % des importations d’ailerons de requin en Chine et à une réduction de plus de 75 % du prix de l’ivoire et de la corne de rhinocéros en Asie. en 2016, WildAid a également lancé une campagne de sensibilisation du public en Chine et au Vietnam visant à éliminer la demande d’écailles de pangolin sur les deux plus grands marchés du monde.
Nadège Christelle BOWA