Quand surviennent les règles: 95 filles sur 100 n’ont aucune idée de ce qui leur arrive

Cette situation est une porte ouverte aux moqueries qui en raison du tabou qui entoure encore aujourd’hui cette question, est la source de bien de blessures psychologiques chez la fille.

Sable, poussière, herbe pillée, feuilles sèches…Quand il s’agit de cacher leurs premières règles, les filles regorgent d’ingéniosité au péril de leur santé. Mais elles y sont contraintes par des adultes. « Certaines filles sont tabassées parce que les parents assimilent les menstrues au rapport sexuel », apprend-t-on. Pourtant souligne Pr Yap Boum II, « les menstrues ne sont pas une maladie. S’il n’y a pas de règles, il n’y a pas de vie », explique le chercheur. « Il est naturel pour les femmes et les filles d’avoir des pertes de sang régulier. Ces saignements peuvent durer 2 à 7 jours. La survenue de ces saignements tous les 21 à 35 jours s’appelle : le cycle menstruel ou règles », précise Bouchard Zambo, Assistant des programmes à ONU-Femmes Cameroun au cours d’un échange avec les journalistes dans les locaux de cette agence des Nations Unies en prélude à la 5e édition de la Journée de gestion de l’hygiène menstruelle qui se célèbre ce jour.
Mais le sujet demeure tabou dans les ménages en dépit de l’implication de nombreuses organisations de la société civile dont Horizons Femmes, KmerPad…, des organisations basées au Cameroun ; des partenaires au développement à l’instar UNICEF, ONUFEMMES, UNFPA. Selon Marie-Claire Kuja, consultante de l’association Kamerpad, « un grand nombre de filles au Cameroun n’ont aucune idée de la période qui les attend avant de commencer ». Le sondage réalisé par Kmerpad sur le sujet révèle l’importance de la sensibilisation sur la gestion de l’hygiène menstruelle notamment en milieu scolaire où les filles semblent subir le plus de frustration mettant en péril leur éducation. L’enquête a interrogé 136 élèves (72 filles et 64 garçons) de 4 écoles secondaires différentes, dont l’âge moyen était de 14,8 ans. Les apprenants ont répondu au sondage électronique en utilisant des tablettes avant et après la sensibilisation.

Les zones de conflit en mode débrouillardise
Selon cette enquête, 11% des garçons pensent que les filles devraient se marier quand elles ont leurs règles. « Ce qui indique que la sensibilisation à la gestion de la santé mentale devrait impliquer les garçons qui pourraient éventuellement présenter des tendances stéréotypées à l’égard de leur partenaire pendant leurs règles », recommande la consultante. Aux autorités scolaires, le sondage rappelle la nécessité de rendre le milieu scolaire flexible à une bonne gestion de l’hygiène menstruelle. « L’idée est que les filles ne restent pas à l’écart de l’école pendant leurs règles », renseigne Olivia Mvondo Boum, co-fondatrice de Kmerpad dont la mission est d’améliorer les conditions de vie et d’hygiène de milliers de jeunes filles et femmes Africaines à travers des accessoires d’hygiène intime réutilisables et lavables et des ateliers de sensibilisation.

« Étant donné la situation économique de la majorité des familles de ces apprenants, peu d’entre elles peuvent se permettre des serviettes jetables pendant leurs règles et ont le plus souvent recours à des produits pouvant causer de graves problèmes de santé », justifie cette dernière. Et d’ajouter : « Cela fait maintenant des années que nous produisons des tampons réutilisables pouvant être réutilisés de manière continue pendant deux ans, ce qui a eu un impact remarquable sur la vie des femmes dans les zones à ressources limitées et dans les zones touchées par les crises ». En effet, d’après l’Unfpa, les femmes en zone de crise humanitaires sont plus touchées par cette problématique. Entre coup de feu, survie et gestion des tabous, le fardeau mental est trop lourd pour leurs frêles épaules. Mais les ressources manquent pour pouvoir le mieux adresser ce problèmes dont les répercussions sont nombreuses et désastreuses sur la vie de la nation.