Riposte contre le VIH/SIDA: Des intelligences pour éliminer les infections chez les ados-jeunes
Le Cadre Stratégique National de la Riposte VIH/SIDA chez les Adolescents et Jeunes au Cameroun pour la période 2021-2023 a été validé à Yaoundé. Il donne les orientations qui vont permettre d’accélérer les progrès et de combler les gaps en matière de lutte contre le VIH/SIDA au sein de cette cible.
La population camerounaise est essentiellement jeune. D’après les statistiques du ministère de la Jeunesse et de l’Education civique, la moyenne d’âge est de 22,1 ans. La tranche d’âge de 10 à 24 ans représente 33,22% de la population. Cette jeunesse qui pourrait être un atout selon les experts des dividendes démographiques se révèle malheureusement un obstacle au développement du pays. A cause notamment de sa vulnérabilité. « Ils sont vulnérables à plusieurs égards et notamment en matière de santé de la reproduction », renseigne Augustin Birba, Représentant adjoint du Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (Unicef), partenaire technique et financier du Cameroun dans l’élaboration du Cadre Stratégique National de la Riposte au VIH/SIDA chez les Adolescents et Jeunes au Cameroun 2021-2023. Le document a été validé au terme d’un atelier de deux jours (23-24 mars 2021) qui a réuni dans la ville de Yaoundé, les experts du Comité national de lutte contre le Sida, les agents du Minjec, les organisations de la société civile et partenaires technique et financier du gouvernement.
De multiples études démontrent que cette frange de la population est confrontée à d’importants problèmes de santé dont le VIH, le Sida et les IST. Parmi les facteurs de leur vulnérabilité : l’insuffisance des connaissances exactes sur le VIH/Sida, les comportements ou pratiques sexuelles à risque, l’exposition aux violences sexuelles et aux violences basées sur le genre, les influences culturelles et religieuses, la précarité sociale et économique, les flux migratoires intenses dans les pôles d’échanges économiques, le nombre croissant de réfugiés, les barrières légales. Selon l’EDS-MICS 25,6% des adolescentes ont déjà débuté leur vie féconde. Les rapports sexuels chez les 15-19 ans sont de l’ordre de 24,5% chez les filles et de 30,2% chez les garçons ; 31% de femmes de 20-24 ans sont mariées avant 18 ans. La prévalence des grossesses précoces chez les adolescentes de 15-19 ans est de 27,5%.
Accélérer les progrès
Bien que la prévalence du VIH soit plus faible dans la tranche d’âge de 15 à 24 ans (EDS, 2018), la situation de cette tranche de la population reste très préoccupante au niveau de l’incidence du VIH (plus élevée chez les filles (1,2 %) de 15-19 ans contre 0,2% chez les garçons de la même tranche d’âge (CAMPHIA 2017). Cette même enquête montre que les nouvelles infections à VIH surviennent neuf (09) fois plus fréquemment chez les filles que chez les garçons. Alors même que les programmes de prévention du VIH au sein de cette cible font face à plusieurs défis. A titre d’illustration : seuls 28,7% de jeunes filles et 33,5% de jeunes garçons de la tranche d’âge des 15-24 ont des connaissances approfondies sur le VIH ; seulement 63,8% des adolescentes de 15-19 ans utilisent des préservatifs pour se protéger contre l’infection au VIH. Ces tendances varient entre les régions et sont plus marquées à l’Est, au Nord-Ouest, au Sud, au Centre et dans l’Adamaoua.
Par ailleurs, regrette Augustin Birba : « Les services sociaux de base sont peu conviviaux et limitent l’accès des adolescents. En termes de suivi-évaluation les données de routine ne sont pas toujours disponibles, du fait des outils de collecte de données peu désagrégés pour les adolescents, comme l’on relevé l’analyse des sources de données dans le cadre de l’analyse des goulots d’étranglement faite lors de l’initiative ALL IN ». Face à l’ampleur du problème, l’Etat du Cameroun, conforté dans sa démarche par les partenaires au développement, notamment l’UNICEF, a élaboré un nouveau Cadre Stratégique National de la riposte au VIH/Sida 2021-2023 chez les adolescents et les jeunes. « Il s’agit de mettre en place un cadre stratégique qui traduit la vision globale et définit les priorités devant servir de base à la conception et à la mise en œuvre de programmes et projets spécifiques en matière de lutte contre le VIH chez les jeunes et les adolescents », explique Mounouna Foutsou, Ministre de la Jeunesse et de l’Education civique. Il précise que : « Grâce à cet instrument d’orientation, le Gouvernement pourra donner plus de visibilité à son action, harmoniser les interventions de tous les acteurs œuvrant dans la prévention primaire du VIH/SIDA et faciliter la mobilisation des contributions des organisations nationales et internationales qui appuient ses efforts dans ce domaine ».
Seuls 32,2% des adolescents sous ARV
De l’avis technique du Secrétaire permanent du Cnls, « c’est un document qui respecte toutes les normes internationales ». Et Augustin Birba de renchérir : « ce Cadre Stratégique va permettre d’accélérer les progrès et de combler les gaps en matière de lutte contre le VIH/SIDA chez les adolescents et jeunes du Cameroun, aussi bien dans les domaines de la prévention, la lutte contre la vulnérabilité et la stigmatisation, la promotion du dépistage-conseil, que le lien avec la prise en charge qui constitue un maillon faible, puisque seuls 32,2% des adolescents de 10 à 19 ans qui vivent avec le VIH ont été identifiés et mis sous traitement ARV en 2020 ». Cependant insiste le Minjec, « Pour être efficace, la mise en œuvre de ce document doit d’être collective ». Aussi, au-delà des ressources internationales, il a besoin de ressources domestiques pour l’atteinte des objectifs ambitieux.
Nadège Christelle BOWA